15 faits historiques… totalement FAUX
Entre mythes et malentendus
L’Europe est un continent traversé par l’Histoire, comme en témoignent ses monuments néolithiques, ses vestiges romains, ses grands chefs-d’œuvre de la Renaissance ou encore ses champs de ruines hérités des deux dernières guerres mondiales.
Alexandre le Grand, Einstein, Mozart, Jules César, Napoléon — autant de figures illustres qui ont marqué les esprits à jamais. Pourtant, la manière dont nous percevons leur passé est souvent idéalisée, et certaines croyances, bien que fausses, ont la vie dure…
Dans cet article, découvrez quelques-unes des idées fausses les plus courantes à propos de l’histoire européenne.
Adaptation française par Lisa Reymonet
Les batailles médiévales étaient totalement anarchiques.
De Braveheart à Game of Thrones, les films et séries n’hésitent pas à prendre des libertés avec l’histoire — surtout lorsqu’il s’agit des batailles. Le décor est planté : une plaine, avec, de part et d’autre, deux clans déchaînés prêts à défendre leurs terres au prix de leur vie.
Très vite, c’est l’attaque : les groupes rivaux se foncent dessus, armes au poing, en hurlant à pleins poumons, avant de s’entrechoquer dans un fracas sanglant. C’est alors que le combat vire au chaos. Les grands seigneurs sont happés dans une mêlée confuse, où alliés et ennemis finissent par se confondre. Enfin, à l’issue de longues heures de combat meurtrier, l’un des camps est quasiment anéanti, et les vainqueurs éreintés déambulent au milieu d’un champ jonché de cadavres.
Cependant, n’en déplaise aux cinéphiles, la réalité était bien moins épique : les batailles rangées n’avaient pas souvent cours au Moyen Âge, et, lorsqu’elles avaient lieu, elles étaient bien plus organisées qu’on ne serait tenté de le croire.
Les batailles médiévales étaient totalement anarchiques.
D’abord, bien évidemment, les soldats faisaient tout pour survivre. Or, lorsqu’on tient à sa vie, se jeter à corps perdu dans une formation de piquiers ennemis n’est sans doute pas la meilleure stratégie. Ensuite, rompre les rangs en pleine bataille était une manœuvre risquée, souvent synonyme de défaite.
C’est pourquoi les avancées étaient généralement contrôlées, et seuls les hommes en première ligne combattaient dans un premier temps. Autre facteur à considérer : les armures. Souvent très lourdes, elles épuisaient rapidement les soldats, au point que ceux-ci, ralentis, devenaient des cibles faciles — d’où l’intérêt d’éviter de courir dans la boue, sous peine de s’enliser.
Enfin, de nombreux films ont tendance à exagérer l’ampleur des affrontements, notamment en ce qui concerne les pertes humaines. En réalité, la plupart des batailles se concluaient par une retraite, une impasse stratégique ou une reddition — rarement par un anéantissement complet. L’Angleterre et la France n’auraient jamais pu se faire la guerre pendant plus d’un siècle si leurs armées avaient été décimées dès le premier affrontement.
La toge était un vêtement courant dans la Rome antique.
Le poète Virgile désignait les Romains comme le « peuple en toge » (gens togata) — description qui semble corroborée par les fresques et les statues d’époque. Pourtant, la toge, bien qu’emblématique, n’était portée que pour certaines occasions, et surtout, pas par tous les Romains.
Réservée aux citoyens — groupe excluant d’emblée étrangers, esclaves et exilés —, la toge était en fait si peu pratique à porter que ceux qui avaient le droit de s’en revêtir l’évitaient dès qu’ils le pouvaient. Idéal pour se faire remarquer au théâtre, mais peu adapté aux tâches du quotidien, le vêtement était lourd, chaud, difficile à garder propre et cher, tant à l’achat qu’à l’entretien.
La toge était un vêtement courant dans la Rome antique.
Au Ier ou au IIe siècle de notre ère, la plupart des Romains portaient des tuniques unisexes, aux longueurs et couleurs variées, qu’ils assortissaient de pagnes, de sandales et de ceintures. En revanche, dans la bonne société, c’était la toge qui avait la faveur de l’élite lors des banquets mondains et des assemblées sénatoriales : les notables arboraient fièrement ce vêtement, dont la coupe et la couleur reflétaient leur rang social.
Alors, la prochaine fois que vous croiserez quelqu’un habillé en toge lors d’une soirée costumée, pourquoi ne pas engager la conversation sur les origines du vêtement ? Vous pourriez bien lui apprendre quelque chose.
Les Vikings portaient des casques à cornes.
Bien que le costume de Viking soit parmi les préférés des enfants, comme celui de pirate et de cow-boy, la véritable histoire de ce peuple n’a rien d’un conte de fées. Ces pillards (signification de leur nom en vieux norrois) sont célèbres pour avoir semé la terreur sur les côtes européennes entre le IXe et le XIe siècle, réduisant des villages entiers en cendres et dérobant des trésors inestimables à grands coups de hache.
Aujourd’hui, vous pourrez trouver le fameux casque à cornes, devenu un incontournable de la garde-robe viking, dans n’importe quelle boutique de déguisement. Mais, au regret de vous décevoir : cet accessoire est une invention des temps modernes.
Les Vikings portaient des casques à cornes.
Ajouter des cornes à un casque aurait été une ineptie : d’abord, elles l’auraient alourdi, ensuite, elles se seraient facilement emmêlées lors des combats, et enfin, elles auraient posé une difficulté technique inutile aux forgerons du haut Moyen Âge.
La légende du casque à cornes n’a émergé qu’au XIXe siècle, soit bien longtemps après l’accostage du dernier drakkar sur les côtes européennes. À ce jour, seuls deux casques vikings intacts ont été découverts (en photo ici) et aucun ne portait de cornes.
L’armée française a enchaîné les capitulations.
Cette croyance peu flatteuse pourrait avoir deux origines distinctes. On peut d’abord penser à un événement historique : le contournement de la ligne Maginot par l’armée allemande en 1940 et la défaite éclair de la France qui s’ensuit, les nazis prenant Paris en six semaines à peine.
À cela s’ajoute un élément plus contemporain, issu de la culture populaire : dans un épisode de 1995 des Simpsons — série satirique très regardée aux États-Unis — Willie, le jardinier écossais, tient des propos peu élogieux au sujet des Français, et s’adressant à eux, dit : « Rendez-vous, singes mangeurs de fromage ».
L’expression est ensuite reprise et popularisée par le journaliste conservateur du National Review, Jonah Goldberg, après le refus de la France de soutenir les États-Unis dans la guerre en Irak.
Ces deux éléments, l’un historique et l’autre culturel, ont ainsi contribué à ancrer un stéréotype tenace dans l’imaginaire collectif américain.
L’armée française est sans cesse en train de capituler.
Mais la réalité est toute autre, comme le prouve l’histoire que la France partage avec ses voisins — l’Angleterre, l’Espagne et la Belgique, pour ne citer qu’elles. Selon l’historien Niall Ferguson, l’armée française détient le record de succès militaires en Europe, avec 109 victoires, 10 impasses et 49 défaites, soit un taux de réussite de 65 %. N’en déplaise aux sujets de Sa Majesté, les fameuses batailles d’Azincourt, de Crécy et de Poitiers, dont ils tirent tant de fierté, se sont toutes déroulées au cours d’une guerre que la France a fini par gagner.
En outre, rappelons que dans le panthéon des grands stratèges de l’Histoire, aux côtés d’Alexandre le Grand et de Jules César, se tient également Napoléon, redoutable chef de guerre.
Enfin, il suffit d’observer le vocabulaire militaire anglais pour saisir l’influence française dans ce domaine : les mots lieutenant, reconnaissance, bayonet, camouflage, regiment et general sont tous issus de la langue de Molière.
La grippe espagnole est née en Espagne.
On se souvient aujourd’hui de la Première Guerre mondiale comme de l’une des plus grandes tragédies de l’Histoire. D’ampleur sans précédent, elle a décimé environ 16 millions de personnes en l’espace de quatre ans à peine.
Comme si cela n’était pas suffisant, vers la fin du conflit, un nouveau virus a fait son apparition : la grippe espagnole. Il a déclenché une pandémie qui, selon certaines estimations, aurait entraîné la mort de trois fois plus de personnes que les combats eux-mêmes, et ce, en deux fois moins de temps.
Considérée comme l’une des pires catastrophes sanitaires de l’histoire humaine, la grippe espagnole a refait surface dans la mémoire collective lors de la pandémie de COVID-19, à travers de vieilles photographies sur lesquelles on peut voir des hôpitaux saturés, des personnes qui portent des masques en gaze et des affiches qui exhortent la population à se laver les mains.
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La grippe espagnole est née en Espagne.
Si la grippe espagnole reste d’abord assez méconnue dans certains pays en guerre, comme la Grande-Bretagne, les États-Unis ou l’Italie, c’est notamment parce que les autorités choisissent de taire toute information susceptible d’entamer le moral national, allant jusqu’à censurer les premiers signalements de la maladie.
Restée en marge du conflit, l’Espagne bénéficie, elle, d’une presse libre, contrairement à celle de ses voisins belligérants. Cependant, étant le seul pays à évoquer l’épidémie, elle finira par être perçue à tort comme le foyer du virus par le reste du monde… tout cela pour la simple et bonne raison que ses journalistes ont fait leur travail.
Les pirates pratiquaient le supplice de la planche.
Une grande partie de l’imaginaire moderne lié à la piraterie trouve son origine dans un seul ouvrage publié en 1883, L’Île au trésor de Robert Louis Stevenson. Ce livre a notamment popularisé certains symboles aujourd’hui indissociables de la piraterie — cartes au trésor, jambes de bois et perroquets, entre autres.
Le supplice de la planche apparaît aussi dans le livre, mais il est en réalité tiré d'un ouvrage plus ancien, publié en 1724 par Daniel Defoe, l’auteur de Robinson Crusoé. Mais, vous vous en doutez maintenant : tout accrocheurs qu’ils soient, ces éléments ne reposent sur aucune réalité historique.
En vérité, les châtiments les plus fréquents chez les pirates étaient le fouet ou l’exil forcé sur une île déserte avec pour seule compagnie un pistolet chargé d’une seule balle. Après tout, pourquoi s’embarrasser du cérémonial de la planche, quand il suffisait de jeter la personne par-dessus bord ?
Les pirates pratiquaient le supplice de la planche.
À l’âge d’or de la piraterie, des flibustiers ayant bel et bien existé, comme Barbe Noire ou le capitaine Kidd, font brièvement fortune en pillant les navires marchands dans les Caraïbes et les autres mers du globe. Mais, bien que brutaux et cupides, ces hommes étaient loin des caricatures véhiculées par les dessins animés actuels.
Parmi les clichés les plus tenaces figure sans doute la fameuse intonation du pirate — car oui, il va sans dire que les forbans du XVIIIᵉ siècle ne passaient pas leur temps à grommeler.
Là encore, L’Île au trésor est en cause, ou plus exactement son adaptation de 1950, dans laquelle l’acteur Robert Newton (en photo ici) choisit de prêter à Long John Silver un accent anglais très marqué du sud-ouest de l’Angleterre qui renforce l’image de hors-la-loi du personnage. Une trouvaille qui marquera durablement l’imaginaire collectif.
Les forces américaines et britanniques ont entrainé la chute du Troisième Reich.
Dans l’imaginaire occidental, la Seconde Guerre mondiale s’achève grâce à la résilience britannique et à la puissance américaine. Après la reddition éclair de la France en 1940, la vaillante Grande-Bretagne (soutenue par des millions de soldats venus de son empire) se serait dressée seule face à la machine de guerre du Troisième Reich… jusqu’à l’arrivée des États-Unis en 1941, qui, en chevaliers blancs, auraient libéré l’Europe des griffes des nazis.
Cette réécriture de l’histoire trouve probablement son origine dans la montée des tensions entre l’Union soviétique et l’Occident à la fin du conflit, un refroidissement des relations qui a conduit à sous-estimer le rôle de l’armée rouge dans l’effondrement du Troisième Reich.
Pourtant, les chiffres sont formels. Pendant l’essentiel du conflit, plus des trois quarts de la puissance de feu allemande étaient concentrés sur le front de l’Est : c’est là que quatre des cinq millions de soldats allemands ont perdu la vie.
Les forces américaines et britanniques ont entrainé la chute du Troisième Reich.
Si le Débarquement et Dunkerque sont les moments phares de la guerre à l’Ouest, à l’Est, la bataille de Stalingrad (visible ici) pourrait bien constituer un tournant encore plus décisif. Hitler et Staline ne reculent devant rien pour mobiliser des armées gigantesques, s’affrontant pour la prise de la ville, malgré des températures glaciales.
Il s’agit de l’assaut le plus meurtrier de l’histoire de l’humanité, avec environ 1,2 million de morts — un chiffre supérieur aux pertes militaires combinées du Royaume-Uni et des États-Unis.
Lors de la conférence de Potsdam en 1945, les chefs d’État des trois grandes puissances alliées se réunissent, notamment pour faire état des pertes humaines — c’est-à-dire de l’ampleur du sacrifice consenti par chacune des nations.
Les États-Unis comptent 418 500 morts (soit 0,32 % de leur population) et le Royaume-Uni 450 700 (0,76 %). L’Union soviétique, elle, a payé le plus lourd tribut, avec environ 24 millions de morts, ce qui représente la proportion impressionnante de 14,8 % de sa population totale.
Au Moyen-Âge, l’Europe était chrétienne.
De la figure du croisé en marche vers la Terre sainte à celle du moine reclus dans son monastère, le christianisme occupe une place centrale dans l’image que l’on se fait de l’Europe médiévale.
S’il s’agit bien de la religion dominante des grandes puissances de l’époque — qui l’exporteront par la suite à travers le monde —, il serait toutefois réducteur de croire que le christianisme est la seule doctrine à pétrir le continent.
Le territoire d’Al-Andalus, couvrant de vastes régions de l’Espagne et du Portugal, reste pendant des siècles sous domination musulmane, tandis que le paganisme prospère encore dans le nord-est de l’Europe jusqu’au XIVe siècle.
Mais c’est l’Empire ottoman — immense puissance musulmane — qui demeure le plus injustement écarté du récit européen.
Au Moyen-Âge, l’Europe était chrétienne.
L’historien Marc David Baer affirme que la dynastie ottomane a constitué un « véritable empire européen », formant une « partie méconnue du récit que l’Occident ne prend pas en compte dans sa propre histoire ».
Pendant cinq siècles, cet empire domine l’Europe du Sud-Est. Il étendra son pouvoir jusqu’en Hongrie et assiègera notamment Vienne à deux reprises.
Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle qu’il commencera à desserrer son étau, ce qui permettra l’émergence de nations comme la Grèce, la Bulgarie, la Serbie ou encore la Roumanie.
Des mosquées ottomanes se dressent encore aujourd’hui l’Europe de l’Est, notamment dans des pays comme l’Albanie, où l’islam reste la religion majoritaire.
Les monuments grecs et romains étaient blancs.
Depuis des siècles — et plus particulièrement à partir de la Renaissance — l’esthétique de marbre blanc attribuée aux Grecs et aux Romains est devenue synonyme de raffinement.
Des sculptures majestueuses de Michel-Ange aux colonnes solennelles du Capitole des États-Unis, l’influence de l’Antiquité dans le monde reste manifeste.
Ces créations monochromes sont, pour certains, l’expression la plus pure de l’art : élégantes, intemporelles et sublimées par l’authenticité d’une pierre immaculée.
Les monuments grecs et romains étaient blancs.
Il y a pourtant un détail essentiel que l’on oublie souvent : les Romains et les Grecs peignaient leurs monuments dans des couleurs vives. Leurs temples et leurs statues étaient richement décorés, mais les pigments n’ont pas résisté à l’épreuve du temps ; il ne subsiste aujourd’hui que la pierre nue. On a beau le savoir, cette vision idéalisée perdure, et les copies modernes restent le plus souvent figées dans une esthétique brute.
Sur la photo, on voit la célèbre statue d’Auguste de Prima Porta, sculptée par des artistes grecs à Rome au Ier siècle après J.-C., placée à côté d’une réplique restituant ce que les spécialistes pensent être sa palette de couleurs d’origine.
On est loin de la sobriété classique que l’on associe habituellement à l’Antiquité, n’est-ce pas ?
Au Moyen-Âge, on pensait que la Terre était plate.
On aime se rassurer en réduisant nos ancêtres à des êtres ignorants et superstitieux— cela flatte notre égo — mais les savants de l’Europe ancienne savaient, depuis fort longtemps, que la Terre est ronde.
En effet, dès 500 av. J.-C., le mathématicien grec Pythagore défend cette théorie, et le célèbre philosophe Aristote vient la confirmer 150 ans plus tard. Il faudra attendre un siècle supplémentaire pour que l’astronome grec Ératosthène calcule la circonférence de la Terre… avec une remarquable précision, s’écartant de seulement quelques kilomètres des valeurs modernes.
Au Moyen-Âge, on pensait que la Terre était plate.
Voici l’Erdapfel, le plus ancien globe terrestre connu. Il a été réalisé en Allemagne en 1492, l’année même où Christophe Colomb découvre le Nouveau Monde, ce qui explique l’absence des Amériques.
À l’époque, comme aujourd’hui, certains pensaient que la Terre était plate, mais tout scientifique médiéval qui aurait soutenu une telle idée aurait été tourné en ridicule. L’historien Jeffrey Burton Russell résume bien la situation : « Dans l’histoire de la civilisation occidentale, depuis le IIIe siècle av. J.-C., il était impossible pour un esprit instruit d’affirmer que la Terre était plate ».
Churchill a déclaré qu’il fallait combattre sur les plages.
On disait de Winston Churchill qu’il avait mobilisé la langue anglaise et l’avait envoyée au combat, et ses prises de parole — dont beaucoup nous sont parvenues sous la forme d’enregistrements radio grésillants — restent tout aussi bouleversantes 80 ans plus tard. We shall fight them on the beaches (« Nous combattrons sur les plages ») est l’un des discours les plus célèbres de l’histoire, bien que la formule ait été légèrement déformée.
La citation complète est : « We shall fight on the beaches, we shall fight on the landing grounds, we shall fight in the fields and in the streets, we shall fight in the hills; we shall never surrender » (« Nous combattrons sur les plages, nous combattrons sur les terrains d'atterrissage, nous combattrons dans les champs et dans les rues, nous combattrons dans les montagnes ; nous ne nous rendrons jamais »).
Churchill a déclaré qu’il fallait combattre sur les plages.
D’ailleurs, tant qu’on parle de citations apocryphes, Marie-Antoinette n’aurait jamais dit « Qu’ils mangent de la brioche », pas plus que Gandhi « Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde », ou encore la reine Victoria « Cela ne nous amuse pas » — du moins, si l’on en croit sa famille.
Contrairement à une idée répandue, Voltaire (ici en photo) ne serait pas non plus l’auteur de la célèbre formule : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous puissiez le dire ». Cette phrase, qui résume bien sa pensée, a en réalité été rédigée longtemps après sa mort.
Et pour finir, Jules César n’aurait jamais prononcé la célèbre réplique « Et tu, Brute » (« Toi aussi, Brutus ») lors de son assassinat en 44 av. J.-C. Elle apparaît pour la première fois chez Shakespeare, tandis que l’historien romain Suétone rapporte qu’il aurait plutôt dit en grec : « Kai su, teknon » (« Toi aussi, mon fils »).
Raspoutine aurait séduit l’impératrice et défié la mort.
Passé à la postérité grâce à la chanson Rasputin de Boney M et aux nombreuses adaptations cinématographiques — notamment dans les films Hellboy, The King’s man : Première mission ou dans le dessin animé Anastasia — ,Grigori Raspoutine n’en finit pas d’alimenter les mythes plus d’un siècle après sa mort.
Simple paysan devenu guérisseur, ce personnage aux yeux perçants s’impose, contre toute attente, comme le confident de la tsarine Alexandra, suscitant le scandale dans la haute société russe à la veille de la Révolution.
Accusé de débauche avec ses fidèles et soupçonné d’une liaison avec l’impératrice, son ascendant sur la cour devient mal vu. En 1916, un groupe d’aristocrates le fait assassiner. Selon l’un d’eux, il aurait fallu l’empoisonner, lui tirer dessus à plusieurs reprises et le précipiter dans un lac gelé pour arriver à en venir à bout.
Raspoutine aurait séduit l’impératrice et défié la mort.
Boney M s’empare des anecdotes les plus scabreuses au sujet de Raspoutine, le qualifiant d’« amant de la reine de Russie » et de « plus redoutable machine à aimer du pays ». La chanson relate également la tentative d’empoisonnement dont il aurait été victime : on aurait versé du poison dans son vin… qu’il aurait bu sans sourciller, avant d’affirmer : « Je me sens bien ».
Les historiens rejettent largement l’idée d’une liaison entre Raspoutine et la tsarine. Par ailleurs, son autopsie a conclu plus sobrement qu’il a été abattu d’une balle tirée à bout portant.
Les paroles du célèbre tube disco ne relèvent cependant pas entièrement de la fiction. La tsarine était convaincue que Raspoutine avait le pouvoir de guérir son fils hémophile, le tsarévitch Alexis. Mais dans l’ombre, les critiques se faisaient de plus en plus virulentes, alimentées par les rumeurs sur son comportement scandaleux.
L’époque médiévale était un âge sombre.
Peu d’expressions agacent autant les spécialistes de l’époque médiévale que celle d’« âge sombre ». Le terme est utilisé pour la première fois par des érudits italiens à l’époque de la Renaissance — notamment par le poète du XIVe siècle Pétrarque (représenté ici) — dans un contexte de profonde nostalgie pour les prétendues splendeurs de la Rome antique.
Selon eux, cette période aurait commencé après l’effondrement de Rome au Ve siècle apr. J.-C., une période durant laquelle les barbares auraient semé le chaos, au moment même où la vie intellectuelle et artistique aurait sombré dans une forme de léthargie.
Ces érudits imaginaient souvent un âge sombre presque au sens littéral — une époque où la flamme de la civilisation se serait éteinte, laissant les habitants de l’Europe plongés dans l’obscurité, en quête d’une nouvelle direction.
L’époque médiévale était un âge sombre.
Il n’est pas étonnant que les historiens modernes peinent à balayer d’un revers de main cinq à huit siècles d’histoire. D’autant que les débuts du Moyen Âge sont en réalité marqués par un essor agricole, la montée en puissance d’une Église structurée et la naissance des États qui façonnent encore l’Europe d’aujourd’hui.
Pendant ce temps, sur l’autre rive de la Méditerranée, le califat abbasside entrait dans son âge d’or — une période florissante pour la médecine, l’astronomie et les mathématiques.
Mais le Moyen Âge, c’est aussi toute une galerie de personnages hauts en couleur, à commencer par les rois francs et leurs sobriquets pour le moins étonnants, à la limite du comique. Entre Louis le Fainéant, Charles le Simple ou Pépin le Bref, garder son sérieux en tant que courtisan ne devait pas être chose aisée.
Jules César est né par césarienne.
Selon la légende, Jules César serait né par incision du ventre de sa mère, tant il était, dit-on, robuste et peu disposé à venir au monde naturellement — une naissance qui aurait donné son nom à la césarienne. En réalité, cette version largement diffusée ne repose sur aucun fondement historique solide.
La césarienne est une pratique ancienne, mentionnée dans des textes antiques grecs, égyptiens, hindous et chinois. Cependant, elle n’a été réalisée avec succès sur des femmes vivantes qu’au début du XVIIᵉ siècle. Or, Jules César est né en 100 av. J.-C. et l’on sait que sa mère, Aurélia, était toujours bien vivante lorsqu’il a envahi l’île de Bretagne, 45 ans plus tard.
Jules César est né par césarienne.
Cette histoire s’inscrit plutôt dans une tradition millénaire qui consiste à attribuer des naissances extraordinaires aux héros et aux rois. On raconte par exemple qu’un éclair aurait frappé le ventre d’Olympias avant la naissance d’Alexandre le Grand (représenté ici), ou que la mère de Gengis Khan aurait été fécondée par un rayon de lumière.
La légende veut également que le mathématicien grec Pythagore soit le fils du dieu Apollon et que le philosophe chinois semi-légendaire Lao Zi soit venu au monde déjà pourvu d’une longue barbe grise.
Du temps de Benito Mussolini, les trains arrivaient à l’heure.
Dès 1925, les partisans de Mussolini affirmaient déjà : « Au moins, grâce à lui, les trains arrivent à l’heure ». Une expression qui a traversé près d’un siècle avec une étonnante résilience, et ce, en dépit de ses racines profondément ancrées dans la propagande fasciste.
Benito Mussolini prend le pouvoir en Italie en 1922 avant de diriger le pays d’une main de fer pendant plus de vingt ans, s’alliant notamment à l’Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. Au cœur de sa propagande, une mise en scène millimétrée de l’efficacité : armée disciplinée, économie bien dirigée… et trains prétendument ponctuels.
Au bord de la défaite, il connaîtra une fin tragiquement banale pour un dictateur fasciste du XXe siècle : exécuté par des partisans, sa dépouille est exposée, pendue devant une station-service à Milan.
Du temps de Benito Mussolini, les trains arrivaient à l’heure.
En réalité, Mussolini a hérité de l’un des réseaux ferroviaires les plus efficaces d’Europe — largement reconstruit après les ravages de la Première Guerre mondiale par le directeur général des chemins de fer italiens, Carlo Crova — et, s’il y a apporté sa touche, ça a plutôt été au détriment de son efficacité.
Aujourd’hui, derrière l’ironie de la formule « Au moins, de son temps, les trains arrivaient à l’heure », on retrouve l’idée tenace qu’un régime condamnable peut malgré tout laisser derrière lui quelques bénéfices tangibles.
Mais face à la répression des libertés, aux crimes de guerre, à la torture et à l’élimination des opposants, il est clair que l’Italie de Mussolini ne peut se prévaloir d’aucun véritable accomplissement, pas même de celui-ci.
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