Conçus pour protéger soldats et civils des attaques ennemies tout en passant inaperçus, les bunkers de guerre étaient souvent enterrés et habilement camouflés. Longtemps abandonnés après les conflits, certains ont sombré dans l’oubli, leurs secrets ensevelis avec eux.
Aujourd’hui, archéologues et passionnés redonnent vie à ces abris silencieux et dévoilent leur histoire méconnue.
Voici six bunkers fascinants, redécouverts dans des lieux pour le moins inattendus.
Adaptation française par Anne Monnin
C’est en creusant un nouveau réseau d’égouts à Wijtschate, en Belgique, que des ouvriers sont tombés sur une découverte des plus inattendues.
En 2019, en plein cœur de cette commune flamande, des vestiges refont surface. Prévenus, des archéologues interviennent rapidement et mettent au jour l’un des plus vastes réseaux de bunkers et de galeries souterraines de la Première Guerre mondiale jamais exhumés, susceptible d’abriter les dépouilles de soldats tombés au combat.
Grâce à ces images saisissantes signées Photography to remember WWOne, cette découverte exceptionnelle ressurgit du passé…
Six entrées du complexe de bunkers sont mises au jour, chacune accessible par 21 marches en bois. Situé à 6 mètres de profondeur, le système souterrain était conçu pour résister aux bombardements, offrant un refuge aux 300 soldats allemands qui s’y abritaient.
D’après le quotidien britannique The Times, ce sont les millions d’obus tirés en 1917 par les forces britanniques, irlandaises et australiennes sur Wijtschate lors de la bataille de Messines qui ont provoqué l’effondrement des murs et plafonds et piégé les soldats sous terre.
Les tranchées françaises et belges étaient gorgées de boue et constamment inondées, et celles-ci ne faisaient pas exception, comme en témoignent les planches de bois découvertes sur le site. En effet, ces caillebotis aidaient les soldats à garder l’équilibre sur ce terrain glissant.
Lors des fouilles, une civière métallique a également été mise au jour. Il suffit de la contempler pour être transporté dans le temps, du paisible village qu’est Wijtschate aujourd’hui aux tranchées boueuses de la Première Guerre mondiale.
De nombreux artefacts ont été découverts sur le site, y compris cette roue de charrette parfaitement préservée. Parmi les autres découvertes figurent des obus chimiques, des mortiers, des grenades à manche, une médaille, des balles et même des talons de bottes ayant appartenu à des soldats.
« Le village ayant été entièrement détruit pendant la guerre, cette rue regorge de centaines d’artefacts directement liés au conflit », a déclaré Sam De Decker, de l’Agence flamande du patrimoine, au Times.
« Les bunkers étaient bien plus petits qu’on ne l’imagine », explique Robin Schaefer, historien militaire allemand. En développant son propos, il ajoute :« ils étaient composés de petites pièces très exiguës, peu confortables et oppressantes, avec des plafonds bas ».
Robin Schaefer poursuit en décrivant les conséquences du conflit : « Après la bataille, la zone a été intégralement rayée de la carte. Tout avait été pulvérisé par les obus, des millions et des millions d’obus. Les puits d’accès de ce refuge ont probablement été détruits par les bombardements. La plupart des soldats ont été faits prisonniers, mais beaucoup n’ont jamais été retrouvés et reposent encore là. Ce tunnel pourrait être une véritable capsule temporelle ».
Quant à ce casque allemand, on ne saura jamais s’il a été abandonné lors de la capture de son propriétaire ou si ce dernier a connu une fin plus tragique encore.
En avril 2024, lors d’un projet de restauration écologique dans un parc belge, des ouvriers ont découvert une relique oubliée de la Seconde Guerre mondiale.
En restaurant les dunes et en supprimant des plantes invasives du parc Directeur général Willems de la ville balnéaire de Knokke-Heist, ils mettent au jour trois bunkers « intacts », enfouis à seulement quelques centimètres sous la surface, selon un communiqué de presse des autorités locales.
Ces dunes qui couvrent près de 20 hectares en Flandre, une région belge marquée par des combats acharnés pendant les deux guerres mondiales, ont une histoire fascinante. Entre 1914 et 1918, elles furent le théâtre de l’installation de deux batteries d’artillerie lourde allemandes, surnommées « Freya » et « Augusta ». Ces positions stratégiques comprenaient des canons imposants, des bunkers d’observation, des casernes, ainsi qu’un réseau complexe de tranchées et de barricades.
Après la Première Guerre mondiale, la quasi-totalité de ces infrastructures fut démantelée. Cependant, à peine deux décennies plus tard, l'Allemagne transforma de nouveau ce site en une redoutable forteresse...
La construction de la base, connue sous le nom de « Stützpunkt Heyst » ou « Base de Heist », débute en 1942. Elle intègre le Mur de l’Atlantique, la ligne de défense côtière d’Hitler, qui s’étend du nord de la Norvège jusqu’à la frontière franco-espagnole.
Les archéologues découvrent trois bunkers légers de type VF2a, dont celui-ci, entièrement exhumé. D’après des photos aériennes et des descriptions de l’époque, les experts estiment que le site formait une « forteresse imprenable », composée d’environ soixante bâtiments, dont des bunkers à munitions, des casernes, des plateformes pour canons lourds et un mur antichar.
Abandonnés puis oubliés pendant près de 80 ans, ces bunkers ne contiennent presque rien d’autre que du sable et de l’eau de mer. Chaque bunker se compose d’une seule pièce qui mesure environ 6 mètres sur 7, avec des murs et un toit en béton armé d’une épaisseur de 90 cm.
Bien qu’aucune trace de la Première Guerre mondiale ne soit découverte lors des fouilles, d’autres structures datant de 1939-1945 sont mises au jour, notamment deux tranchées en briques, un fragment de piste en béton et un puits. Il est probable que d’autres bâtiments se trouvent encore sous le sable, mais pour l’instant, ils restent enfouis.
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Les archéologues ont également découvert des amas de déchets datant de la guerre : ustensiles, fragments de conduites d’eau, câbles et même des munitions.
Après une étude approfondie et une documentation minutieuse, il a été décidé de privilégier la restauration des dunes au détriment des découvertes archéologiques liées à la guerre. Les bunkers ont donc été recouverts de sable afin de préserver ces bunkers pour les générations futures.
Contrairement à d’autres vestiges souvent enfouis, les restes de ce bunker étaient véritablement dissimulés à la vue de tous. Ils ont été découverts en 2021 par David Etheridge, professeur d’archéologie au Strode College, en Angleterre.
David Etheridge était alors en vacances, assis sur la plage de Saunton Sands en train de savourer un fish and chips, lorsqu’il a aperçu une structure artificielle au pied des falaises. Pouvez-vous l’identifier ?
Habilement dissimulé dans une paroi rocheuse accidentée, ce mur en béton faisait autrefois partie d’un bunker datant de la Seconde Guerre mondiale, conçu pour défendre la plage. Il exploitait ingénieusement une section de l’une des nombreuses grottes naturelles formées dans la falaise par l’érosion.
Il est vite apparu qu’il s’agissait d’un bunker d’entraînement américain, probablement l’un des nombreux édifiés par les 10 000 soldats stationnés sur les plages du nord du Devon pour se préparer à l’invasion alliée de la France occupée par les Allemands.
À l’intérieur, la grotte naturelle se distingue nettement des ajouts artificiels.
« Je savais que Saunton Sands avait été utilisée par l’armée américaine pour se préparer au Débarquement et j’ai immédiatement supposé que ce lieu faisait partie de leur terrain d’entraînement », a déclaré David Etheridge. « J’ai voulu en savoir plus. À mon retour, j’ai cherché des informations, mais je n’ai étonnamment rien trouvé. J’ai donc contacté les archéologues locaux ».
« Si je ne l’avais pas remarqué, il aurait fini par être englouti et personne n’en aurait jamais rien su. Je suis très heureux de l’avoir découvert », a déclaré David Etheridge, avant d’ajouter : « les évènements qui se sont déroulés en Normandie font partie intégrante de notre mémoire nationale, et cette petite structure a joué un rôle important dans le succès du Débarquement ».
Suite à cette découverte, les autorités du comté de Devon ont confirmé l’inclusion de ce site dans le registre du patrimoine historique local.
Le brigadier général Paul W. Thompson, qui dirigeait alors l’entraînement militaire, aurait déclaré : « Si Waterloo a été gagnée grâce aux terrains d’exercices d’Eton, alors les plages du nord du Devon ont sûrement joué un rôle crucial dans le succès du débarquement sur les plages normandes ». C’est pourquoi des reconstitutions historiques comme celle-ci se tiennent souvent sur la plage de Saunton Sands.
On se croirait dans le dernier Indiana Jones : un historien amateur achète une veste de soldat américain lors d’une brocante. Dans une des poches, il découvre une carte froissée indiquant l’emplacement de ce bunker.
La batterie de Grandcamp-Maisy, qui couvre une superficie équivalente à quatre terrains de football selon un article du Telegraph, était une position clé pour les Allemands lors du Débarquement. Restée enfouie pendant 60 ans, elle est mise au jour en 2006 par Gary Sterne, qui a procédé à l’excavation de ce complexe impressionnant.
Les historiens, qui débattaient depuis longtemps de l’emplacement de la batterie, pensaient que Gary Sterne (ici en photo) travaillait dans de simples champs, selon un article du Telegraph.
Cependant, après avoir quitté son domicile dans le Cheshire, au Royaume-Uni, pour rejoindre la Normandie, Gary Sterne découvre une entrée dissimulée par la végétation, menant au complexe.
Gary Sterne achète une maison à proximité du site, puis acquiert les 16 hectares de terrain couvrant le complexe auprès de 32 propriétaires différents, avant de mener des fouilles pendant deux ans.
Il découvre alors les vestiges de bunkers et de tranchées, ainsi qu’un hôpital de campagne, des bureaux et l’emplacement d’un canon de 155 mm. Au total, la batterie aurait compté quatre canons, quatre pièces de 105 mm et douze canons antiaériens.
Le site est désormais ouvert au public.
La batterie de Maisy revêtait une importance stratégique cruciale pour les Allemands en raison de sa proximité avec Omaha Beach, l’une des cinq plages de débarquement des forces alliées. Les troupes américaines y ont perdu 2 400 soldats, notamment sous les tirs provenant de Maisy.
Envoyé à la pointe du Hoc pour neutraliser une autre batterie, un bataillon de Rangers américains découvrit que les tirs provenaient en fait de Maisy. Les historiens s’interrogent encore sur la manière dont le commandement britannique ou américain a pu ignorer ce détail crucial et sur le fait que des vies aient pu être perdues inutilement. Gary Sterne a lui-même écrit plusieurs ouvrages dénonçant ce qu’il qualifie, avec d’autres, de « dissimulation ».
Dan Farley, âgé de seulement 17 ans et membre du 5ᵉ bataillon de Rangers lors du Débarquement, faisait partie des soldats ayant pris d’assaut Maisy.
« Quand nous sommes arrivés, il n’y avait que des bunkers souterrains », se souvenait-il en 2014 lors d’une interview accordée à Fox8Live TV. « Nous sommes entrés, et le combat au corps à corps a commencé. La batterie de Maisy était aussi infernale qu’Omaha Beach, voire pire... J’ai été touché à l’épaule, probablement par un tireur embusqué » ;
En 2020, de nouvelles fouilles révèlent des bunkers qui « n’avaient pas vu la lumière du jour depuis 75 ans ». Pour Josh Gates, animateur de l’émission Expedition Unknown sur Discovery Channel, ces événements représentent « l’un des chapitres les plus sombres de l’histoire moderne », comme il l’a expliqué lors d’une interview avec Fox News.
Si une grande partie de l’histoire des Première et Seconde Guerres mondiales repose encore dans des champs boueux, la guerre froide, elle, a laissé derrière elle des abris antiatomiques secrets disséminés à travers le monde, souvent dans des lieux des plus inattendus.
En 2021, Jennifer Little, passionnée de brocantes et de trésors cachés, explorait une propriété en Californie lorsqu’elle a fait une découverte des plus surprenantes.
En déplaçant des meubles dans la chambre principale, Jennifer découvre une trappe cachée sous un buffet des années 1950 pesant 180 kilos, partiellement recouvert de moquette.
Pour seuls indices de ce qui se trouvait en dessous, de discrètes fentes de ventilation intégrées aux murs et aux angles de la pièce.
Peu rassurée à l’idée d’explorer cet espace sombre, Jennifer Little demande à son mari de s’en charger.
Le couple s’attend d’abord à trouver un bunker de la Seconde Guerre mondiale, mais ils comprennent rapidement qu’il s’agit en réalité d’un abri antiatomique des années 1950, vestige de la guerre froide.
Délaissé depuis des années, l’abri est envahi par les gravats et la poussière, et son étanchéité n’est plus assurée. À la lueur de sa lampe torche, le mari de Jennifer y découvre deux lits superposés, un urinoir, ainsi qu’un espace distinct réservé au stockage de vivres.
La maison, érigée en 1951 au plus fort de la guerre de Corée, a vu le jour la même année que la condamnation du couple Rosenberg pour avoir transmis des secrets nucléaires à l’URSS. Jennifer Little en déduit que l’abri a sans doute été construit en même temps que la maison et qu’il a pu constituer un argument de vente à l’époque.
Près des lits superposés se trouvent des bouteilles et des bocaux recouverts de poussière. Ils font probablement partie des provisions d’origine entreposées dans l’abri par les premiers propriétaires.
Sans surprise, Jennifer Little, connue sur TikTok sous l’identifiant @slocal_estate_auctions, a rapidement fait le buzz après avoir publié une vidéo relatant sa découverte.
En 2021, des ouvriers effectuant des travaux de terrassement pour la construction d’un nouveau casino à Middelkerke, station balnéaire en Belgique, font une découverte insolite.
Les travaux sont aussitôt interrompus, et la municipalité, consciente de l’importance de la découverte, fait appel à des archéologues. Ces derniers fouillent la zone sablonneuse et découvrent non pas un, mais deux bunkers dissimulés.
Ces bunkers, faisant partie du Mur de l’Atlantique, avaient été dissimulés suite à la construction d’un casino et d’un parking à la fin de la guerre.
Malgré l’ensablement total des entrées, les parties intérieures étaient remarquablement bien conservées, comme vous pourrez le constater.
À l’intérieur, les bunkers sont étonnamment spacieux, avec des plafonds relativement hauts. Plusieurs inscriptions officielles sont encore visibles sur les murs, dont l’une interdisant d’allumer la lumière, selon VRT News.
Aucune arme ni effet personnel n’a été découvert sur le site Ces objets ont probablement été retirés par les troupes canadiennes ou britanniques ayant libéré la région.
« Dans un bunker comme celui-ci, ce ne sont pas seulement le matériel et les objets découverts qui importent. L’histoire qu’il raconte a toute son importance », a déclaré le ministre flamand chargé du Patrimoine après avoir visité le site.
« Ce bunker suscite un grand intérêt et nous permet d'avoir une compréhension plus précise du déroulement de la guerre ici ».
Après des fouilles approfondies menées par les archéologues, les bunkers ont été démolis pour permettre la construction du nouveau casino (visible ici). Cependant, leur démolition n’a probablement pas été facile en raison des murs en béton de plus de deux mètres d’épaisseur, conçus pour protéger leurs occupants.
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